Tribune – Créer de l’emploi en France, c’est un mal(us)…

Réforme du chômage : Richard Girardot, Président de l’ANIA et Éric Hémar Président de l’Union Transport et Logistique de France réagissent à l’annonce du gouvernement sur sa volonté de mettre en place un système de bonus-malus.

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Le Gouvernement a confirmé il y a quelques semaines sa volonté de mettre en place un système de bonus-malus, pouvant atteindre 1% du coût du travail en fonction du taux de séparation de chaque entreprise par rapport à la médiane du secteur… En clair, les entreprises utilisant des contrats courts ou de l’intérim seront sanctionnées. Et petite nouveauté, au vu du projet de décret envoyé aux partenaires sociaux ce 17 mars 2021, désormais l’ensemble des secteurs d’activité sont concernés au-delà des 7 visés initialement.

 

 

Retoqué par le Conseil d’Etat une première fois par manque de transparence sur les critères retenus, le Gouvernement s’obstine, en dépit de tous les avis contraires, y compris au sein de sa propre administration et malgré une crise économique historique. Comment ne pas résister à un peu plus de rigidification du droit du travail et à quelques lignes de plus sur la fiche de paie ?

 

 

Car c’est bien le problème. Si les entreprises utilisent des contrats courts, c’est d’abord et avant tout pour chercher de la compétitivité. Dans un environnement européen ultra concurrentiel, où le coût du travail français est supérieur à nos principaux voisins, où les règles françaises régissant les CDI sont les plus rigides d’Europe, que faire quand les pics et les creux d’activité nécessitent des variations importantes de main d’œuvre ? Que faire quand une activité est par nature dictée par les saisons, les fêtes et les traditions qui jalonnent notre calendrier ?

 

 

Faut-il alors généraliser des mécaniques de sous-traitance auprès d’auto-entrepreneurs, sur un mode ubérisé ? Ceux-ci échappent aux pénalités et permettent un mode d’organisation plus souple.

 

 

Faut-il développer le travail détaché à l’instar de certains secteurs en France et en Europe ? Ce mode d’organisation échappe également à cette nouvelle taxation.

Ou enfin faut-il mécaniser et automatiser à marche forcée pour trouver à travers des investissements massifs des moyens techniques pour se passer de l’humain dans certains métiers ?

 

 

Bien sûr, dans ces différents cas, la protection sociale des collaborateurs n’est pas toujours la meilleure, les règles régissant le droit du travail ne s’appliquent pas dans leur intégralité et la création d’emploi en France est faible voire négative.

 

 

Le gouvernement n’a pas pris en compte trois éléments essentiels :

  • Dans un contrat, même court, il y a cependant un contrat de travail. C’est-à-dire une véritable protection des salariés que n’offre pas de façon équivalente la sous-traitance ou le travail détaché.
  • Dans un contrat, même court, il y a souvent des jeunes qui découvrent le monde du travail, le respect des règles, la compréhension d’un métier. C’est un facteur d’intégration sociale inégalé.
  • Enfin, dans un contrat, même court, il y a aussi souvent une perspective d’embauche à long terme qui permet à l’entreprise de mettre à son bord des collaborateurs, de les intégrer et de les former, même pour une période limitée, dans l’espoir de pérenniser la création d’emploi si la vie des affaires le permet.

 

Ce projet de taxation du travail est entièrement à contre-temps : à contre-temps car la conjoncture économique s’est inversée en deux ans, à contre-temps car la compétitivité européenne est redevenue notre enjeu majeur, à contre-temps en raison de l’évolution des mentalités et des attentes au travail.

 

 

 

Il serait temps de lever la tête au-dessus du guidon et de ne pas se créer nous-mêmes de nouveaux obstacles pour se concentrer sur les vrais enjeux de redressement économique de notre pays plutôt que de taxer les entreprises qui embauchent et de pénaliser des secteurs essentiels de notre économie.

 

Éric HÉMAR, Président de l’Union Transport et Logistique de France

Richard GIRARDOT, Président de l’ANIA