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L’ANIA appelle à la fin de la guerre des prix et au respect de la loi

Négociations commerciales : Suite à la réunion du Comité de suivi des relations commerciales qui s’est tenue mardi 20 décembre 2016, l’ANIA tient à rappeler la nécessité de mettre fin à la guerre des prix et de respecter et faire respecter la loi.

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Jean-Philippe Girard

Jean-Philippe Girard

Président de l'ANIA

Depuis son élection au siège de Président de l’ANIA en 2013, Jean-Philippe Girard s’attache à restaurer la confiance des consommateurs dans l’alimentaire et à recréer du lien entre les PME, les grands groupes et les régions.

Président Directeur Général d’Eurogerm qu’il a fondé en 1989, il dirige aujourd’hui plus de 200 personnes impliquées dans la recherche, le développement et la commercialisation d’ingrédients destinés aux industriels de la meunerie et de la boulangerie. Jean-Philippe Girard assure également la fonction d’administrateur de l’ANIA depuis 2002.

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Les ministres Michel SAPIN, Stéphane LE FOLL et Christophe SIRUGUE ont réuni ce mardi 20 décembre les organisations représentatives des acteurs agricoles, agroalimentaires et de la distribution. Le principal objectif de cette réunion était de faire un point sur la situation conjoncturelle des filières agricoles et agroalimentaires, ainsi que sur les négociations commerciales qui viennent de débuter avec la grande distribution. L’ANIA a présenté un état de lieux de la situation économique du secteur agroalimentaire et un premier point de suivi de l’Observatoire des négociations.

Il est important de saluer l’initiative des trois ministres de réunir tous les acteurs de la filière et d’appeler conjointement à la responsabilité de chacun lors des négociations commerciales à venir.
Jean-Philippe Girard, président de l'ANIA

Une filière alimentaire en souffrance et en perte de vitesse en 2016

Jean-Philippe GIRARD, président de l’ANIA a d’abord rappelé que les 16 218 entreprises alimentaires, dont 98% de TPE-PME, pour pouvoir commercialiser leurs produits auprès des consommateurs, doivent négocier avec 4 centrales d’achat qui représentent chacune entre 20 et 25 % du marché.

 

Force est de constater que depuis 2013, les industriels se voient imposer systématiquement des baisses de tarifs par les centrales d’achat. La déflation a ainsi atteint près de 4% en cumul depuis le mois d’octobre 2013. A octobre 2016, la déflation sur un an s’est renforcée pour s’établir à -1,5 %. Cette guerre des prix ne stimule même pas la consommation car dans le même temps, la consommation alimentaire a encore ralenti en 2016 par rapport à 2015. Elle a progressé de seulement 0,8%, soit en deçà de l’évolution démographique alors que la consommation d’ensemble est à +1,8%.

 

En 2016, les prix des matières premières agricoles s’établissent à des niveaux historiquement élevés, en hausse de près de 200% depuis 2004. En octobre sur un an, et sous l’effet de conditions climatiques particulièrement difficiles (intempéries puis faible pluviométrie), le prix des matières premières alimentaires est reparti à la hausse (+12% en ga).

 

En 2016 toujours, le solde commercial de l’agroalimentaire français, s’il reste positif, se dégrade. Les derniers chiffres du commerce extérieur projettent un solde commercial à fin 2016 de 6.9 Md€ contre 8,0 Md€ en 2015.

 

Ainsi, une tension importante s’exerce sur les marges des entreprises agroalimentaires françaises. Contrairement au reste de l’industrie, l’industrie alimentaire peine à retrouver son niveau de marge d’avant la crise de 2007-08. Son taux de marge a ainsi baissé de près de 4 points depuis 2007. Ce constat est préoccupant pour la relance de l’emploi et de l’investissement.

 

Dans ce contexte, de nombreux secteurs alimentaires ont récemment renouvelé leurs signaux d’alerte sur les négociations à venir. Parmi eux, le secteur laitier par l’intermédiaire de la FNIL le 07 décembre ou encore le secteur de la charcuterie par l’intermédiaire de la FICT le 15 décembre.

Avec le monde agricole, nous tirons collectivement et successivement la sonnette d’alarme depuis trois ans sur les effets dévastateurs de la guerre des prix. Depuis 3 ans, nous assistons à une destruction continue de valeur au sein de la filière due à une pression continue de la grande distribution sur l'ensemble de ses fournisseurs. Le travail de chaque acteur de la filière doit impérativement être revalorisé.
Jean-Philippe Girard, président de l'ANIA

Des négociations commerciales 2017 déjà sous très haute tension

Afin d’observer les comportements des centrales d’achats avec leurs fournisseurs, l’ANIA a mis en place un Observatoire des négociations. Chaque fournisseur peut informer l’Observatoire d’une situation qu’il considère comme abusive. Lorsqu’un abus est remonté par plusieurs sources distinctes faisant l’objet d’une pratique abusive réelle, l’ANIA adresse un courrier à l’enseigne concernée afin qu’elle puisse résoudre le problème identifié. Cet observatoire permet de repérer des comportements abusifs pendant et en dehors des négociations commerciales.

 

En 2016, l’Observatoire avait recueilli plus de 300 signalements de la part d’entreprises agroalimentaires, de toutes tailles et de tous secteurs. L’ANIA renforcera sa vigilance en 2017 car, comme les années précédentes, de nombreuses remontées évoquent déjà à fin 2016 des demandes systématiques de déflation, souvent déconnectées des contextes commerciaux des fournisseurs.

Nous perdons le sens de nos métiers. Lors des négociations commerciales, les acheteurs ne nous parlent plus des produits, des attentes des consommateurs ou même de nos tarifs. La négociation, ou ce qu'il en reste, démarre sur les prix 3x net de l’année précédente pour demander de nouvelles baisses. C'est dangereux et inacceptable.
Jean-Philippe Girard, président de l'ANIA

De plus, de nombreuses pratiques abusives contraires à la loi perdurent et s’intensifient :

  • Des demandes imposées, sans négociations possible donc, de budgets promotionnels (« Nouveaux Instruments Promotionnels » dits « NIP »). A la traditionnelle guerre des prix s’est ajoutée une guerre des promotions.
  • Des demandes de budgets additionnels pour la fin d’année intitulés « atterrissages des accords 2016 », à payer avant de pouvoir négocier pour 2017
  • Des reports de paiements toujours plus importants de traites de fin d’année,
  • Une pression financière sans précédent liée aux enjeux logistiques : les pénalités logistiques deviennent une véritable manne financière pour les centrales d’achat qui n’hésitent pas à pénaliser leurs fournisseurs sur la base de nouvelles exigences.
  • Des menaces d’arrêts de commandes, de déréférencements, voire des retraits de produits des rayons à effet immédiat

 

Ce sont les raisons pour lesquelles le respect de la loi par tous reste encore malheureusement un prérequis à toute évolution.

                                                                                                                                  

Concernant la loi dite « Sapin 2 » relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, l’ANIA partage pleinement les constats qui ont présidé à l’élaboration des dispositions de la loi. Toutefois, il est important de noter que la loi ne s’attaque pas à la clé du problème qu’est la destruction de valeur par la guerre des prix.

La seule issue possible et pérenne consiste à recréer les conditions favorable à la création de valeur à tous les maillons de la filière et éviter de tirer tout le monde vers le bas. Il est nécessaire de rappeler qu’il ne servira évidemment à rien d’ajouter des outils législatifs et réglementaires s’ils ne font que complexifier une situation déjà trop tendue.
Jean-Philippe Girard, président de l'ANIA